La génèse

Ses géniteurs l’ont porté sur les fonts baptismaux en 1944 sous le nom de « Ciné-club Angevin ». Gilbert Agrapart qui avait bien connu les vagissements de ce nouveau né, se souvenait : « nous nous réunissions dans la cave d’un bistrot de la rue Saint-Aubin. Il nous fallait descendre un escalier en colimaçon. Et si le feu avait pris la-dedans, nous aurions tous été grillés comme des poulets ».

À cette époque, la pratique du cinéma était réservée à des personnes qui en avaient les moyens financiers. Le club regroupait des médecins, des pharmaciens, des avocats, de pépiniéristes locaux et autres professions libérales rémunératrices. Lors de ces premières années d’existence du Ciné-Club Angevin, peu de gens  parmi la population avaient la possibilité de voyager. Ce qui permettait à ces cinéastes aisés de faire découvrir leurs périples dans des contrées du monde entier. Une sorte de « Connaissance du monde » avant l’heure.

Toutes les audaces

En cette période de développement du cinéma d’amateur, la pellicule, son développement et le matériel de tournage valaient une petite fortune. On tournait en effet en 16 mm, et les tenants de ce format prétendaient à l’époque que jamais on ne pourrait avoir une meilleure image…

C’est dans ce contexte qu’a évolué notre club, avec des auteurs inventifs et un encadrement dynamique. On se souvient notamment du DR Keller, qui présida pendant quelques années notre association et qui fut ensuite président du SCO d’Angers.

En ce qui concerne l’animation cinématographique, « Le 3e Œil », un film club (dont est issu le nom de notre atelier aujourd’hui) sur des idées très originales de Jacques Wellinger avait obtenu tous les prix, tant au niveau régional que national. Serait-il possible aujourd’hui de tourner la scène d’une fille sortant d’un coffre d’une voiture, entièrement nue, en plein jour, dans le centre-ville d’Angers ? Jacques Wellinger avait tous les talents, toutes les audaces, toutes les astuces pour arriver au résultat qu’il souhaitait.

Le super-huit

Certes, à côté du format 16 mm, existait bien le 8mm. Mais le résultat obtenu était très sautillant et d’une qualité toute relative. Il était réservé au père de famille qui filmait les vacances de ses enfants ou le mariage du neveu. À Angers, aucun cinéaste n’a utilisé le 9,5 mm, troué en son centre, et très prisé notamment par le club d’Albi.

Puis, vint l’avènement du super 8 (un peu, il est vrai, snobé par les seizistes) qui donna le signal d’un grand essor du cinéma d’amateur. Au cours des années 80, les rencontres régionales nommées « congrès régionaux »  ne réunissaient pas moins de 3 à 400 personnes ! Et avec Pierre Labrosse, Gilbert Agrapart,  ou Jacques Wellinger, l’atelier angevin était l’un des plus prolixes et des plus créatifs de la région. «  F 24.12.31 », « Le train fantôme »,  « Quatre pas dans les sables », « De sol en scie » ont été des films parmi les plus ambitieux et remarqués du moment.

De cette période faste, c’est aussi le mot « amitié » qu’il faut évoquer. Le cinéma était une grande tribu et il n’était pas rare que quelques familles de cinéastes, maris, femmes et enfants, partent en vacances ensemble. Parfois même pour tourner un film…

À l’automne, les adhérents du club angevin se réunissaient autour d’une bonne table pour l’incontournable sortie annuelle.

La vidéo et le numérique

Le déclin du super huit et l’arrivée de la vidéo dans les années 90 ont sonné le déclin de l’activité cinématographique angevine. Il était d’abord impossible d’effectuer du montage avec les premiers matériels vidéo. Ou alors très approximativement, ce qui ne convenait pas à ceux qui recherchaient une bonne qualité pour leurs productions. Le club d’Angers ne comptait alors plus que quelques adhérents et se dirigeait vers une mort certaine.

C’était sans compter sur la ténacité et l’opiniâtreté d’André Menand qui maintint le club « à bout de bras » tout au long de ses vingt ans de présidence. Entre-temps, le Caméra-Club Angevin qui avait succédé au Ciné-Club Angevin était devenu le CVA (Caméra Vidéo Angevin). Un atelier qui, au cours des années, avait beaucoup voyagé à travers la ville, au gré des locaux disponibles que voulait bien lui accorder la municipalité, du boulevard Gaston-Dumesnil en passant par la rue de La-Roe.

Jusqu’au début du nouveau siècle où place lui fut réservée dans les nouvelles installations de la ville, rue du Pré-Pigeon. Le local flambant neuf que nous occupons encore aujourd’hui, avait été inauguré par le maire en personne, Jean-Claude Antonini.

La vidéo numérique, le montage précis et grandement facilité par l’informatique ont encouragé l’arrivée de jeunes retraités passionnés d’images animées qui ont mis tout leur appétit à progresser dans l’art cinématographique. Pour arriver à nos jours. Sans nostalgie, sans regret du passé, mais en ayant toujours en mémoire ceux qui nous ont précédé pour que perdure l’une des plus anciennes associations de la ville d’Angers.